Bouilles à biaise

30.8.05

Six Mois

C’est à la taverne du coin, un peu amoché, sous l’œil aguicheur de Kathou, une floune en liesse anniversairiale, que je fis la connaissance de Klaus, un Torontois, tel que son nom l’indiquait, qui, fraîchement arrivé à Longueuil, affirmait s’être rendu immensément riche grâce à un programme fédéral inédit et récent, et ce, malgré son apparence pour le moins délabrée, laquelle s’expliquait, disait-il, par un désir d’anonymat et un emploi-façade dans une quincaillerie digne des commerces de l’enfance de mes ancêtres. Je ne sus jamais exactement pourquoi il s’embêtait à travailler, surtout avec un patron violent et des collègues non-moins douteux de leurs agissements, alors qu’il roulait sur l’or, mais je réussis néanmoins à comprendre comment il avait accumulé une telle fortune, alors, humblement, voici :

Dès que le CRTC accoucha du projet de loi C-37, la sollicitation non sollicitée devint illégale, et on voulut créer une liste NE-PAS-APPELER, avec une jolie amende de 15 000 pour chaque appel fautif, mais comme cela semblait assez difficile à gérer, on conçut plutôt une liste VOUS-POUVEZ-APPELER, dont, je dois l’admettre, il m’avait également été étonnant d’apprendre que le nombre de twits prêts à sciemment vouloir recevoir des appels d’abonnement à La Presse © franchissait le Rubicon du cap des millions.

Mon nouvel ami Klaus entreprit rapidement de s’assurer que la parenté n’était pas sur cette liste et s’arrangea pour qu’ils militent publiquement contre le télémarketing; puis il se fit passer pour l’un et pour l’autre, demandant précisément à faire partie de la liste VOUS-POUVEZ-APPELER. Il suffisait ensuite de porter plainte et de récolter les 15 000 dollars lorsque le téléphone sonne, et puisqu’au début, les compagnies aux sollicitations débiles se garochaient sur les quelques rares (à ce moment) illuminés qui ajoutaient leurs noms à ladite liste, comme la misère sur les riches, chaque parent listé était ainsi affligé de plusieurs dizaines de requêtes illicites par jour, d’autant plus que les anglophones ont toujours reçu, en moyenne, beaucoup plus d’appels solliciteurs que les francophones, soit respectivement 4,1 appels contre 1,7 par semaine, selon un vieil article du Devoir.

Toujours est-il qu’à 15 000 piastres la requête fautive, et au nombre de beaufs que cumulait Klaus, nul besoin de calculette pour comprendre que nous pourrions boire encore très tard, Klaus et moi… Santé!

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(but kein rendu bicoze technicalung Internetum problemenen)

22.8.05

MadElEinE

Mado ayant manqué le temps des cultivateurs de bleuets de Saint-Thomas-de-Caxton, revêtit sa grande robe blanche et partit dans les champs, son petit panier sous son bras. En une heure, elle ramassa doucement de quoi remplir six (6) tasses de ces savoureux bleuets sauvages. Heureuse, elle revint à la maison gaiement, où elle nettoya hardiment son butin.

Une fois cette corvée achevée, dans une marmite démesurée remplie d’eau, elle fit bouillir ses trois (3) pots Mason de deux cent cinquante (250) millilitres pendant dix (10) bonnes minutes, afin de bien les stériliser. Puis elle remisa ces pots dans le four préchauffé à cent cinquante (150) degrés Fahrenheit. Dans un chaudron, elle fit bouillir ses minuscules fruits, mélangés à une demie (½) tasse d’eau et trois (3) cuillérées à table de jus de citron, tout en brassant constamment avec agilité, pendant dix (10) bonnes minutes. Elle ajouta deux (2) tasses de sucre qu’elle incorpora au mélange. Elle remua toujours sa savoureuse mixture, portée à ébullition, pendant au moins cinq (5) minutes; en fait, jusqu’à ce qu’elle commence à épaissir [la mixtion, pas Mado]. Simultanément, dans un autre poêlon, elle fit bouillir de l’eau, dans laquelle elle jeta les couvercles des ses pots de confiture, pour bien les stériliser à leur tour, mais pas trop longtemps, cinq (5) minutes au maximum.

Elle sortit les pots du four, les remplit de confiture aux bleuets sauvages, mais pas trop, laissant environ un quart (¼) de pouce d’espace avant le rebord du bocal. Avec une petite spatule de bois, elle fit le tour des pots afin de retirer les bulles d’air qui s’y logeaient possiblement. Mado, excitée de tout son ouvrage, avait chaud, terriblement chaud. Sa robe élégamment tachée ne lui était d’aucun secours : elle transpirait à grandes gouttes, tandis que sa langue goûtait la sueur salée qui perlait au-dessus de sa lèvre supérieure. Mado, tremblant délicatement, nettoya le bord de ses bocaux, puis, prestement, elle mit les rondelles SNAP sur lesdits pots, puis les bagues, en veillant à ne pas trop les serrer, tournant jusqu’à ce qu’il y ait un peu de résistance. Avec un amour maternel, elle replongea ses pots ainsi couverclés dans la gigantesque marmite d’eau bouillante, les laissant à leur sort dix (10) minutes durant. La vapeur et la chaleur envahissaient la cuisine devenue sauna. Toujours avec autant de finesse, elle les sortit de leur eau, et les déposa. En quelques instant, grâce à l’habile adresse de Mado, chacun des pots fit retentir son pop! caractéristique, scellant leur destinée à celle de leur amie pour l’automne et l’hiver, à tout le moins…

Exténuée, comblée, Mado se laissa choir dans un fauteuil, une jambe par-dessus le bras dudit fauteuil, la tête repoussée, les cheveux en broussaille, la robe frippée, maculée de bleuets et de sueur, essoufflée. Elle trouva quelques traces de son entreprise, qu’elle essuya du bout des doigts et qu’elle préluda de sucer délicatement, laissant sa langue caresser chaque saveur.

Dieu qu’il était bon d’enfin goûter de cette confiture-là!

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15.8.05

Le conte de la sorcière chagrine

Il était une fois, il y a un temps certain, dans une contrée lointaine, en tout cas, passé Longueuil, dans le rang des Magwa, à Saint-Léon-le-Grand, une gentille princesse, Manon, qui adorait les baies. De sa bay-window frimassée, elle attendait que le beau temps ramène celui des petits fruits.

En juin, chez Steinberg, ne la voit-on-ti-tu pas acheter moult paniers de fraises stéroïdiennes du Mexique… Et brasse, et brasse, et brasse, dans la grande casserole, et sucre, et chauffe, et brasse… Hop! Dans les p’tits pots ces fraises-du-Mexique-là, scellés par des croûtes de ciarges fondus. Mais bozwell de bozwell! Et bout de viarge! Qu’ont-elles donc, ces confitures-là?

Dans les champs, l’oreille au sol, les enfants hument l’arôme que le vent transporte…

En juillet, encore chez Steinberg, ne voit-on-ti-tu pas la princesse Manon, quelques boutons en plus, acquérir ses petits paniers de framboises boostées du Maroc… Et brasse, et brasse, et brasse, dans la grande casserole, et sucre, et chauffe, et brasse… Hop! Dans les p’tits pots ces framboises-du-Maroc-là, scellés par des croûtes de ciarges fondus. Mais bozwell de bozwell! Et bout de viarge! Qu’ont-elles donc, ces confitures-là?

Dans les champs, l’oreille au sol, les enfants hument l’arôme que le vent transporte…

En août, toujours chez Steinberg, ne voit-on-ti-tu pas la Manon, princesse frustrée, la face pleine de pouels, se procurer un char de bleuets ogéhemmisées des États… Et brasse, et brasse, et brasse, dans la grande casserole, et sucre, et chauffe, et brasse… Hop! Dans les p’tits pots ces bleuets-des-États-là, scellés par des croûtes de ciarges fondus. Mais bozwell de bozwell! Et bout de viarge! Qu’ont-elles donc, ces confitures-là?

Dans les champs, l’oreille au sol, les enfants hument l’arôme que le vent transporte…

À force de manger des fruits pleins de cochonneries, la vieille princesse Manon, édentée, devint hilare devant ses miroirs. Faut toujours bien sceller ses p’tits pots à confiture. Et se méfier des croûtes de ciarges usagés refilés par Monsieur le curé, tout comme des p’tits bouts de viarges, comme la princesse Manon…

Et plus jamais on ne la vit derrière sa bay-window…

Tandis que les enfants hibernent, repus et comblés.

Moralité :
Qui scelle mal, les biens pourrissent;
Comme qui sucre trop, mal sourit.


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1.8.05

J'ai rajouté un peu de sel.

N’en pouvais plus de cette garce frivole:
Une Go ask Alice au pays de réfléchissants gels
Me renvoyant mille fois ma propre vilenie.
Aussi, je vis à la marier, en moins de deux.
Pour me délivrer de cet enfer.

Mariée, en définitive, plus, elle ne rigole!
Terminés, ses élans tenaces de folle rebelle!
Et de tous les prétendants hirsutes finis,
Je choisis le plus abominable des affreux,
Apte à la mater, dès cet hiver.

Le calme revenu, un speaker grippé expectore sa météo frigole.
Histoire d’en rajouter, ça a retoussé un peu de gel.

Moi, j'ai rajouté un peu de sel.

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