20.3.05

Déjà un tRou

ModERnité in REnaissancE (2)
Déjà un trou, pourtant il était neuf. Ils étaient neufs. Trop propres. Et le trou, et le chandail… Je ne pouvais détacher mon regard de ce singulier trou décorant le fabuleux pull de Peruggi. Quelque chose clochait…

Mais j’étais en retard sur les événements. La mort remontait à quelques heures. Luigi Don Rivello avait, lui, observé les derniers moments de Giovanni Perrugi. C’est lui qui avait composé le 9-1-1. C’est lui qui avait tenu son pote dans ses mains pendant sa lente agonie, qui avait tenu sa main par-dessus celles de son pote mourrant. C’est lui qui avait tenté de consoler le mourrant pendant que son dernier souffle expirait de sa poitrine, celui qui avait pleuré le mort en premier, celui qui avait fermé les paupières de son ami. Quelqu’un retrouvera sûrement à condamner sa façon de mettre des empreintes partout, de bousiller les indices en touchant au mort, en l’ayant aidé à se rasseoir, en l’ayant tripoté. Malgré cela, moi, je comprenais bien ce réflexe humain, cette compassion normale qu’on devrait tous avoir avec quelqu’un qu’on aime qui nous chie dans les pattes, pour ainsi dire.

Il va sans dire que c’était le suspect numéro un.

Selon Luigi Don Rivello, le décédé avait pu murmurer quelques vagues paroles sans beaucoup de sens : « Andante adagio allegro, Luigi, alla Santa Lucia, Luigi, andante adagio allegro, Luigi, d’accordo, Luigi, si? » Du délire, des trucs de musique, dirait-on… en italien et en bonus. Le gars meurt et il ne nomme pas son agresseur, il marmonne des indications musicales à son meilleur ami. Il ne dit pas « pourquoi m’as-tu fait ça, Luigi? » ou « c’est Marconni qui a fait le coup. » ou « je t’aime Luigi, mon beau… » Non, rien de tout ça. « Andante adagio allegro. » Vraiment, selon moi, s’il eut respiré plus encore, je crois que je lui eus conseillé de revoir ses priorités de vie. Il était mort comme il semblait avoir vécu, avec des trucs compliqués et inutiles dans ses préoccupations premières. De toute façon, j’en avais rien à foutre. Il était mort. Je devais théoriquement trouver le coupable. Le reste n’était que futilités et rhétorique.

Mais voilà, pour l’instant un seul indice véritable : les dernières paroles d’un homme.


Et son meilleur ami comme seul suspect.

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